Melankolic / Virgin :: 1998 :: acheter ce disque

Qui sont donc ces "Ancients" si chers au emcee d’outre Manche ? "Les Ancients sont les quatre arts originels du hip-hop. breaking, rhyming, graffiti et deejaying. C’est comme si maîtriser ces arts anciens faisait de toi l’ultime combinaison du Jedi et de Yoda." confie-t-il. Lewis admet pourtant n’en posséder réellement que trois, le graff n’étant pas sa matière de prédilection. Bien prétentieux qui oserait lui en tenir rigueur alors que tant de rappeurs peinent à dompter une seule de ces disciplines.

Cet album/EP s’ouvre sur le planant et éthéré "Theme From The Ancients" scratché par notre surdoué multidisciplinaire ; de courte durée comme pour ne pas gâcher ce qui va suivre. Effectivement, dès les premières notes de "Shadows of Autumn (dirty version)" il est difficile de résister à la tentation de s’abandonner à la profondeur instrumentale de ces violons hitchcockiens que martèle inlassablement une percutante section rythmique. Cette ambiance cinématographique constitue un écrin luxueux aux rimes ciselées du emcee au flow si pénétrant. A peine remis de nos émotions, Parker enchaîne avec "A Thousand Fragments", titre délicat où il partage le verbe avec Supa T. Les métaphores tristes se croisent et nous proposent d’imaginer la vie en centaines de fragments…

Le morceau suivant, "Fake Charades (dirty version)" persiste dans la même veine mélancolique que son prédécesseur ; un soupçon de combativité supplémentaire dans la voix du emcee. Le refrain "life gets hard, some get scarred" illustre l’esprit désabusé de cette composition sublime. Le meilleur reste pourtant encore à venir avec l’éminent "Crusades", véritable perle romantique qui telle les sirènes d’Ulysse nous attire vers ses écueils. Lewis Parker livre là un bouleversant manifeste à la gloire de tous les combattants oeuvrant afin d’asseoir le hip hop à la place qui lui est due. Magistral.

Comme si cela ne suffisait pas, "Song Of The Desert" prouve une nouvelle fois l’excellence des productions de notre homme. D’énigmatiques et discrètes cascades de piano éclairent une batterie emphatique supportant la diction parfaite d’un texte poétique. "I watch a cloud sailing over us. Soon’s the rain. And I shall compose some verses on the inconstancy of happiness" telle est l’introït de "Eyes Of Dreams", regard désenchanté sur la futilité des rêves, annihilés sous l’action de la réalité. Une ligne de basse comme sortie d’un songe rehausse le beat lourd de cette composition envoûtante. La dernière plage s’intitule quant à elle '101 Pianos (i’ve put out the lights)', et clôt dans la douceur ténébreuse des claviers ce EP somptueux.

Lewis Parker réussit avec Masquerades & Silhouettes à conjuguer le lyrisme, la délicatesse de la musicalité et l’ampleur phénoménale de rythmiques forgées dans l’airain. Jamais conventionnelle, la sensibilité de sa musique émerveille par sa cohérence et par la puissance de sa sincérité. Comme il le signifie :

My music is just about being elevated
I mentally elevate through music