Cathexis Records :: 2002 :: acheter ce disque

Depuis quelques années, la scène hip-hop californienne est devenue la cible des "médias" underground qui jadis la fuyaient au profit du hip-hop new-yorkais sous influence DJ Premier, les seules exceptions étant les NWA (puis Death Row), les navrants Cypress Hill et Coolio, les déchus Pharcyde, ou encore les Hieroglyphics (qui à l’époque se sont fait chasser comme des malpropres par leurs labels respectifs). Avec des artistes sortant de ces trois principaux réservoirs que sont le Project Blowed, les Living Legends ou la Hobo Junction (en schématisant un peu beaucoup), la scène Westcoast Underground est en passe d’être la Mecque du hip-hop, si ce n’est déjà fait.

Passant pour des inconnus au milieu de cette impressionnante scène malgré quelques albums et projets solos à leur actif, la petite entreprise californienne Escape Artists (soumise à quelques remaniements de personnel avant cet album) propose Plot Against Theme comme l’album de leur consécration. Les Escape Artists ne se comparent pas tellement aux cadors locaux (malgré la présence de trois d’entre eux sur cet album), délaissant l’aspect rap en tant que tel pour du spoken-word.

Les Escape Artists Xczircles (dont la façon d'articuler les syllabes fait beaucoup penser à Aesop Rock), Amnesia, Aamir, Trex et la nouvelle venue Ahmuse ressassent, voire accentuent, dans leur nouvel album les pérégrinations de 3D Massacre, leur premier essai qui réunissait des enregistrements de 1997 à 2000. Plot Against Theme est pavé d’anecdotes et de métaphores (hum hum, pas évidentes à comprendre/traduire) qui servent de fil directeur à leurs morceaux, le tout dans une ambiance noire malgré quelques lueurs, déprimante malgré quelques traits d’euphorie, désespérante même si chacun tend à être positif sur l’ensemble.

L’omniprésent Xczircles prend en charge une grande part de productions pour ce disque, laissant leur ancien compagnon de route Jani5 s’occuper de cinq morceaux, pour un résultat en dent de scie, et un nouveau collaborateur en la personne de The Moth pour un morceau pas très mémorable. Le salut sonore vient par conséquent par Xcircles (de temps en temps épaulé sur les consoles par ses partenaires de rimes) qui redéfinit la bande-son Escape Artists : des ambiances de cordes sombres et enivrantes souvent privilégiées aux mélodies sur des beats downtempo lourds et entêtants.

L’osmose aurait pu être parfaite entre les artistes évadés et leurs productions, mais le gros problème des Escape Artists est qu’ils entraînent l’auditeur dans une spirale dépressive insoutenable en écoute intégrale. Pour preuve, même 2Mex intervient de façon anodine et se retrouve noyé dans leurs morceaux. Pourtant, pris séparément, des morceaux sortent vite fait du lot, en l’occurrence le magnifique "Attics", véritable hymne puissant qui propulse le début d’album et éclipse d’une façon écrasante le reste, mais aussi "Meetings Of The Minds" et le solo très minimal de Trex "Monkee Skulls" (l’unique morceau fourni en scratches !). Pour compléter cette faible liste, il faudra attendre la fin d’album avec "Soul Purpose" avec Tommy V. et Awol One dont le charisme impressionnant est déjà venu à bout de pires malfaisances sonores, le tumultueux "Full Moon, Empty Head" de Xczircles et Ahmuse, le sans queue ni tête "Without I Thought Mind" et l’enivrant "Hampster Dance" (même s’il utilise un sample maintes fois rabâché).

Trop de lacunes, en particulier musicales, laminent cet album, et gâchent énormément le potentiel qu’ont laissé entrevoir les Escape Artists, en particulier Xczircles, Ahmuse et Trex. Leurs futurs projets solos annoncés rehausseront, du moins on l’espère, l’opinion qu’on a pu se faire d’eux avec ce disque. On ne doute pas de leurs capacités.