Autoproduit :: 1999

Fidèle à son phrasé grave, quasi monocorde, mais soutenu aux beats par deux complices (Block et Omega), Aesop Rock, d'une voix qui fait beaucoup plus que son âge (22 ans), démontre qu'il sait tout faire : beatboxing sur la "Appleseed Intro", jazz rap sombre sur 'Dryspell' (saxo + contrebasse), hip hop austère et ténébreux sur "Same Space (Tugboat Complex)". Mais c'est à partir des cordes et de l'orgue discrets de 'Sick Friend' que l'album atteint sa véritable et prodigieuse vitesse de croisière et enfile merveille sur merveille.

Ceux pour qui le rap, austère, sobre et sur l'os des premiers morceaux manque décidement d'entrain, se réjouiront de "1000 Deaths", recyclage inhabituel et ingénieux de la vieille formule violon / piano. Ils apprécieront aussi le complexe, tourmenté et orientalisant "Blue in the Face" ainsi que l'ultime morceau de Appleseed : un "Odessa" où Aesop Rock sort sa flûte et débauche le fantaisiste Dose One, un des meilleurs étalons de l'écurie Anticon, pour un final en apothéose.

Ce court album en crescendo démontre qu'Aesop Rock aurait amplement mérité sa place aux côtés des grands vainqueurs des référendums hip hop de fin d'année pour le titre de meilleur album 1999, rien que ça, s'il avait sorti son album plus tôt, et surtout, s'il avait bénéficié d'une bien meilleure visibilité. Gageons pour se consoler que la petite graine plantée par Appleseed dans le paysage hip-hop donnera prochainement d'autres fruits aussi juteux.