Fondle'em :: 1999 :: acheter ce disque

L'excellence d'Operation Doomsday n'est pourtant pas une surprise pour qui surveille de près la scène underground new-yorkaise depuis trois ou quatre ans. M.F. Doom est en effet l'auteur d'une bonne série des singles qui ont fait de Fondle'em le label indépendant le plus apprécié de ce côté-ci de l'Amérique. Tous figurent d'ailleurs sur cet album, pas si neuf qu'il en a l'air. Les plus connaisseurs peuvent même remonter à 1991, année de la sortie de Mr. Hood, premier album de KMD, groupe où sévissait un certain Zev Love X, qui n'est autre que le M.F. Doom d'aujourd'hui. Ou plus tôt encore, quand le même accompagnait 3rd Bass sur le classique Cactus Album.

Compilation plus qu'album, Operation Doomsday ne manque pourtant pas d'unité et de cohérence. Quatre ou cinq traits caractéristiques permettent de cerner M.F. Doom. Tout d'abord, et sans surprise, ce son lourd et inquiétant, émaillé d'effets bizarres, avec lequel se sont déjà illustrés quelques poids lourds de l'underground new-yorkais, et qu'illustrent à merveille les violons dérangés de "Tick, Tick" et les cuivres menaçants de "Hey". Mais aussi, des emprûnts larges et répétés au musiques noires des 70's les plus sexies et lancinantes, présents sur la quasi intégralité des morceaux.

D'autres spécificités s'ajoutent à celles-ci. Quelques freestyles, comme "The Hands of Doom", de nombreux extraits de cartoons (Scoubidou, les 4 Fantastiques et l'Incroyable Hulk, dont le pire ennemi n'est autre que le Dr Doom qui figure sur la pochette) en guise d'interludes. Mais aussi, les fausses fins : quasi systématiquement, les titres s'achèvent par une courte pause, avant de reprendre pour quelques dizaine de secondes dans une version purement instrumentale. Histoire de démontrer qu'en plus d'être un MC redoutable, M.F. Doom a su assurer sur un plan strictement musical.

A en croire son auteur, l'ambition de Operation Doomsday était de carresser l'auditeur à rebrousse-poil, de prendre à contre-pied, systématiquement, tous les effets faciles qui risquaient de s'imposer à lui. C'est probable, et pourtant, le résultat en est l'inverse total. L'album, finalement, se laisse écouter, et, quelques passages ardus comme "Tick, Tick" exceptés, s'avère tout à fait respirable. Au point qu'une meilleure publicité dans l'avenir lui permettra, on espère, d'être pleinement reconnu pour ce qu'il est : l'album le plus emblèmatique, sinon le meilleur, de cette faste année 1999.