Waxexpress Productions :: 2001 :: acheter ce disque
Un an après le ton est totalement différent. Opposé même. Roméo Buscemi est en effet devenu le plus grand fan sur Terre de Necro et se lance corps et âmes dans le rap horrorcore qu’affectionne son modèle. Plus question de se laisser dicter sa conduite par les canons en vigueur du rap d’ici. Le MC et son groupe se sentent aujourd’hui autorisés à toutes les extravagances verbales. Et ces habits là leur vont beaucoup mieux, comme ils l’ont déjà prouvé sur la mixtape Gastro-Entérite.
Résultat : des paroles dignes du plus extravagant des films gores, déclamées avec conviction par Buscemi, qui améliore son phrasé depuis les derniers enregistrements. Excessives, cartoonesques, les paroles sont l’occasion à maintes poilades. Morceaux choisis :
Un couteau planté dans l’anus et je peux continuer tranquille mon cunnilingus.
J'ai assassiné Armani, j’ai accidenté Lady Di, alors t’étonnes pas si j’essaie d’attenter à ta putain de vie.
Etc, etc... Busc invente même le rap horrorcore conscient sur "Boucherie" :
Pour les mythos qui traitent toutes les femmes de nymphos, ça va être la putain de boucherie.
En gros, t’es gentil avec ta meuf ou je t’éclate la gueule.
Cobalt, l’autre MC, embraye systématiquement sur le style de son collègue, mais avec moins de cœur, moins de tripe, plus de timidité. Il est visible que Buscemi l’a entraîné dans un délire qui n’est pas forcément le sien. En revanche, MC Jean-Claude Van Damme, lui, est plus fort que jamais. Le judoka mongolien voit l’un de ses passages radiophoniques reproduit sur le sixième track, et nous apprend fort à propos que toutes les species de la Terre sont aware, including l’eau, le poisson et E.T. dans une autre galaxie. Etonnant. Hilarant. Et assez horrorcore.
Reste la musique, désespérément lo-fi, à base de samples de Necro, de beats lourds, d’effets brinquebalants et d’extraits de disques de scratches. Sur le premier titre, LSD dévoile la découverte du siècle : une instru d’Eurythmics au ralenti, ça donne du Necro. Evidemment, il est conseillé d’aimer et Eurythmics et Necro pour apprécier, sinon ça risque d’être dur à passer. Le second titre, "Boucherie", façon BO de L’Exorciste ou autre film d’horreur, est moins mémorable que les paroles ("ça va être la putain de boucherie", on vous l’a déjà dit). Mais les deux derniers remportent une mention honorable. "Gastro-Entérite", aussi présent sur la mixtape du même nom, est réussi, même si LSD s’est sans doute un peu trop dit "on va faire notre titre expérimental là". Et le beat menaçant de "Fight Club", lui, est vraiment très bon. Vraiment.
C’est clair, Boucherie est loin d'être un chef d’œuvre, même si la progression est là. Mais si le groupe pouvait apprendre aux rappeurs français moyens que le hip-hop n’est pas une recette et qu’ils ont tout intérêt à en faire ce qu’ils en veulent sans se soucier de règles qui n’existent que dans leurs têtes, ça serait déjà salutaire. Jean-Claude Van Damme ne vous le répétera jamais assez les gars : be aware.