Ubiquity :: 2002 :: acheter ce disque

Le groupe comporte 6 membres : un producteur : Lodge Infinite ; un DJ : Mixmaster Wolf, également membre de Breakestra ; et 4 mcs : Metalogik, Longevity, Kemit et Jahli. Tout ce petit monde sort du Unity Committee Crew, collectif qui abrita en son temps 3 futurs Jurassic 5 (Chemist, 2Na et Marc 7)... Fait remarquable: il semble qu'ils livrent ici leur premier album en 10 ans d'existence (!), ce qui d'une part nous éclaire sur leur quasi-anonymat et qui d'autre part laisse rêveur quand on sait que les 16 titres tiennent sur un vinyle pour une durée totale d'environ 40 minutes... On peut donc formuler 2 hypothèses : soit ils sont extrêmement flemmards, soit extrêmement perfectionnistes. Seule l'écoute du disque peut nous renseigner, allons-y donc.

Une réponse s'ébauche après la première écoute: la production est très sèche, pas d'effets d'ambiance, on se contente d'une boucle bien sentie (pas trois notes de pianos je veux dire) et d'un beat bien rough pour soutenir le flow des rappeurs. Le risque serait donc de bailler à partir de 5/6 minutes, alors que là avec des tracks de 3 minutes qui s'enchaînent parfaitement et des loops très finement construites on atteint un minimalisme quasi-jouissif et l'ensemble est finalement très cohérent.

Le style de Lodge Infinite rappelle donc un peu le travail de RZA sur la B.O. de Ghostdog, en quand même largement moins funky. Il se paie même le luxe de nous sortir 2-3 morceux instrus sans nous ennuyer. Ce qui est assez étonnant c'est le savant brassage des influences (funk, musique hindoue, Sun Ra...) et paradoxalement l'homogénéité du tout. Mixmaster Wolf est aussi omniprésent sans être envahissant. Il évite les traditionnels pièges des samples vocaux faciles et se concentre sur les beats et les sons sourds qui accompagnent parfaitement les instrus.

Penchons-nous maintenant sur les MCs. Il est très honnêtement difficile de différencier leurs voix tant leurs flows sont semblables : les textes, pour la plupart bien abstrait à souhait, sont récités d'un ton monotone, un peu à la manière d'artistes spoken word, souvent extrêmement articulés et finalement un peu pauvre ryhtmiquement parlant. Mais c'est un fait, ils conviennent parfaitement aux prods de Lodge. A signaler aussi la discrète présence sur un titre d'un honorable membre de la Confrérie des Libres Styleurs, le bien nommé P.E.A.C.E...

Le tout donne un rendu qui sonne assez sec sur le coup mais qui s'apprécie à sa juste valeur sur la longueur, après x réécoutes. A ce titre leur style rappelle un peu celui d'Anti-Pop sur Tragic Epilogue : peu accessible pour l'amateur de party sound mais délectable pour l'auditeur aventureux (je parie que tu te sens visé(e), cher(e) lecteur (trice)). Une bonne leçon à méditer pour tous les groupes qui nous font subir chaque trimestre leur mixture tièdasse. Rendez-vous en 2012 pour le nouveau Darkleaf (on y sera)...